En 2018, alors que moins de 10% de la population du Sierra Leone utilisait internet de manière régulière, le gouvernement a créé la Direction de la Science, de la Technologie et de l’Innovation (DSTI) et l’a chargée de la transformation numérique du pays. Cependant, comme l’indique l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques:
Les tendances démographiques actuelles et les technologies émergentes offrent au pays une opportunité de développement global par l’innovation. Un an plus tard, la DSTI publie la Stratégie Nationale d’Innovation et de Numérisation (National Innovation and Digital Strategy, NIDS) du Sierra Leone à la suite de recherches approfondies sur le paysage numérique du pays menées par la DSTI et avec le soutien du Tony Blair Institute for Global Change. Sans surprise peut-être, la vision était la suivante: « la numérisation pour tous ». Les 3 principes stratégiques qui allaient nous aider à tendre vers cet objectif étaient les suivants:
Le pays comme laboratoire en IA — utiliser les données pour éclairer les prises de décision du gouvernement et la fourniture de services publics.
La priorité donnée au téléphone portable — pour connecter plus de citoyens.
Des technologies hybrides — adopter une approche omnicanale pour assurer des services inclusifs.
Le pays comme laboratoire en IA
La NIDS donne la priorité à un modèle de « pays comme laboratoire en IA », qui repose sur 2 principes:
Afin de relever ses défis sociétaux, un pays doit appliquer des méthodes de recherche quantitatives et qualitatives à son contexte social.
Nous devrions exploiter les enseignements tirés de nos recherches afin de développer, puis de transposer à plus grande échelle les approches réussies afin qu’elles profitent à l’ensemble du pays.
« Le Sierra Leone a fourni la plateforme pour la recherche en IA et en science des données ainsi que le développement de prototypes pour amorcer, mettre à l’échelle et traduire les innovations afin d’obtenir un impact positif sur les citoyens », indique la stratégie.
Les méthodes de gestion de la pandémie — y compris la distanciation sociale et les confinements — ont été particulièrement difficiles à appliquer dans les pays à revenu faible ou intermédiaire. Dans cette optique, la DSTI a collaboré avec des universités, des partenaires internationaux pour le développement, des instituts de recherche et le secteur privé pour utiliser des méthodes de recherche quantitatives et qualitatives et l’IA pour éclairer les décisions relatives aux confinements et autres interventions pendant la pandémie.
Par exemple, nous avons utilisé des historiques de données d’appels anonymisés pour comprendre les mouvements des personnes, ce qui nous a permis d’introduire des restrictions de confinement par région pour endiguer la propagation du virus tout en permettant l’accès aux marchés et aux autres services essentiels. La DSTI, en partenariat avec le MIT Governance Lab, a mené des enquêtes d’opinion nationales pour aider le gouvernement à « comprendre ce que nos concitoyens savent et leur capacité à répondre efficacement et à nous soutenir dans toutes les interventions que nous planifions dans cette lutte contre le covid-19 ».
La priorité donnée au téléphone portable
Dans la quête de la « numérisation pour tous », il est important de considérer que la technologie mobile est la seule technologie qui a le potentiel de connecter tous les Sierra-Léonais. Des données récentes montrent que le pays a un taux de pénétration de la téléphonie portable d’environ 88 %, avec un taux de connexion au haut débit mobile de 47%.
Dans cette optique, il était essentiel que nous nous engagions à donner la priorité au développement et à la fourniture de services optimisés pour les appareils mobiles dans les secteurs public et privé.
Deux ans après le lancement de la NIDS, nous avons vu des prestataires de services des secteurs public et privé concevoir des services essentiels auxquels les gens peuvent accéder depuis leur téléphone portable.
Par exemple, avant la mise en place de passerelles SMS et USSD pour accéder au portail de services gouvernementaux (Government Services Portal, GSP), les étudiants avaient besoin d’un accès internet par le biais d’un ordinateur, d’une adresse électronique et d’une carte à gratter à triple usage qui coûtait 6,15 dollars US, juste pour savoir si les résultats à leur examen national étaient disponibles. C’était cher, ça prenait du temps et ça pénalisait des familles entières, pas seulement les élèves qui attendaient leurs résultats. De plus, les élèves qui passaient les examens nationaux perdaient environ 3 mois d’apprentissage en attendant leurs résultats desquels dépendait leur affectation dans une école.
Le GSP permet aux familles d’accéder aux résultats des examens nationaux à leur convenance, sans frais, en utilisant un court code USSD, via des téléphones les plus basiques. Il leur suffit de taper « résultats » et de voir les options qui s’offrent à eux. En septembre 2021, 327 133 utilisateurs uniques avaient consulté les résultats de leurs examens nationaux.
L’utilisation de la technologie mobile pour accéder aux services se développe et continue d’améliorer l’expérience utilisateur des citoyens.
Des technologies hybrides
Bien que les technologies mobiles jouent un rôle essentiel dans la transformation numérique du Sierra Leone, la NIDS prévoit que l’avenir sera « de plus en plus hybride ». Elle s’attend à ce qu’il y ait un besoin accru de « solutions à l’échelle du système qui sont optimisées pour atteindre tous les citoyens à l’intérieur et à l’extérieur des segments de marché conventionnels », et elle estime que « la technologie moderne a brouillé les lignes entre les solutions binaires (par exemple, les applications en ligne et hors ligne, ou les solutions distribuées basées sur le cloud et les serveurs locaux) grâce au développement de systèmes hybrides ».
Voici un exemple de cas où le secteur public a utilisé une combinaison de méthodes pour fournir des services aux citoyens : Le président Bio a lancé le programme gratuit d’éducation scolaire de qualité en 2018. Cependant, la pandémie a forcé la fermeture des écoles à l’échelle nationale et les élèves ont dû rester à la maison. Le ministère de l’Éducation, en partenariat avec la DSTI, a collaboré au développement de méthodes d’enseignement par le biais du web, de la télévision, de la radio et de la technologie mobile. Le résultat de cette méthode hybride est qu’il n’y a eu que peu ou pas de rupture dans l’éducation des élèves — elle leur a donné différentes options pour accéder à l’éducation, conformément à la politique d’inclusion du gouvernement.
Regarder vers l’avenir
Le plan de développement national montre que le gouvernement est conscient des avantages de la technologie pour accélérer le développement et l’égalité, mais il reconnaît également l’importance des objectifs de développement durable. Une question importante pour l’équipe de la DSTI n’est pas de savoir si nous utilisons la technologie, mais comment nous l’utilisons, afin de favoriser un meilleur accès aux services dans tous les secteurs, accroître et améliorer l’élaboration de politiques fondées sur des preuves, et permettre la numérisation pour tous. Nous nous assurerons de garantir cela.